Publié par Le Québec, avec ses hivers rigoureux et ses étés parfois caniculaires, fait face à des manifestations climatiques de plus en plus extrêmes. Les infrastructures routières, piliers de notre économie et de nos déplacements quotidiens, sont particulièrement vulnérables aux inondations dévastatrices et à la dégradation accélérée causée par les vagues de chaleur intenses. Pour l’industrie de la construction, et plus spécifiquement pour le génie civil, la question n’est plus de savoir si nos routes seront mises à l’épreuve, mais comment les rendre suffisamment résilientes pour résister aux assauts d’un climat changeant. Ce défi colossal pousse les ingénieurs et les bâtisseurs à repenser la conception, la construction et l’entretien de nos réseaux routiers, afin d’anticiper les impacts et d’assurer la pérennité de nos artères vitales.
La double menace : l’eau et la chaleur, ennemis des chaussées
Les infrastructures routières du Québec sont soumises à une double contrainte exacerbée par les changements climatiques :
- Inondations récurrentes : Les épisodes de pluies intenses et les crues printanières plus soudaines et volumineuses entraînent des inondations qui submergent les routes, érodent les accotements, endommagent les fondations et emportent des sections entières de chaussée. Les régions riveraines et les zones à faible élévation sont particulièrement touchées, perturbant gravement la circulation et nécessitant des réparations coûteuses. Le ministère de la Sécurité publique du Québec documente régulièrement les impacts des inondations, soulignant la vulnérabilité de nos infrastructures (Ministère de la Sécurité publique du Québec – Inondations).
- Vagues de chaleur et dégradation des matériaux : Moins spectaculaires que les inondations, mais tout aussi insidieuses, les vagues de chaleur prolongées fragilisent l’asphalte et les autres matériaux de surface. La chaleur excessive ramollit le bitume, le rendant plus sensible au poinçonnement et à l’orniérage sous le poids du trafic lourd. Les cycles de gel et de dégel s’intensifient également, provoquant la fissuration et la formation de nids-de-poule, réduisant considérablement la durée de vie utile des routes. Des recherches menées par l’Université Laval et l’École de technologie supérieure (ETS) mettent en lumière l’impact des températures extrêmes sur les propriétés des matériaux routiers (Polytechnique Montréal – Chaires de recherche).
Ces phénomènes climatiques engendrent des coûts exorbitants pour l’entretien et la réparation, sans compter les répercussions économiques dues aux perturbations des transports.
Les stratégies du génie civil : construire l’avenir résilient
Face à ces défis, le génie civil au Québec est à l’avant-garde du développement et de l’intégration de nouvelles approches et technologies pour renforcer la résilience de nos infrastructures routières :
- Gestion des eaux pluviales et drainage amélioré : La clé pour contrer les inondations réside dans une meilleure gestion de l’eau. Cela inclut la conception de systèmes de drainage plus robustes (fossés plus larges et profonds, ponceaux de plus grand diamètre), l’intégration de bassins de rétention pour ralentir l’écoulement de l’eau, et l’utilisation de chaussées perméables dans certaines zones pour favoriser l’infiltration plutôt que le ruissellement. Le ministère des Transports et de la Mobilité durable (MTMD) du Québec intègre de plus en plus ces considérations dans ses guides de conception (Transports Québec – Aménagement routier).
- Matériaux innovants et résistants à la chaleur : La recherche est active pour développer des mélanges d’asphalte plus durables et résistants aux températures extrêmes. Cela peut inclure l’utilisation de bitumes modifiés (avec des polymères ou d’autres additifs) pour améliorer leur rigidité à haute température et leur flexibilité à basse température. L’intégration de matériaux recyclés et la promotion de l’économie circulaire sont également des pistes explorées pour améliorer la durabilité globale des routes. Des centres de recherche comme le Centre de recherche sur les infrastructures en béton (CRIB) de l’Université Laval explorent ces innovations (CRIB – Université Laval).
- Surélévation et renforcement des structures : Dans les zones particulièrement sujettes aux inondations, la surélévation de sections routières ou la construction de remblais renforcés sont envisagées. La protection des talus et des abords routiers par des techniques d’ingénierie verte (végétalisation, fascines) contribue également à prévenir l’érosion.
- Modélisation climatique et planification proactive : L’utilisation de modèles climatiques avancés permet aux ingénieurs d’anticiper les zones les plus vulnérables et de planifier les interventions de manière proactive. Cela inclut l’identification des « points chauds » routiers qui nécessitent une surveillance accrue ou des rénovations prioritaires avant que les dommages ne deviennent irréversibles. La planification à long terme des investissements est essentielle pour une gestion efficace du réseau.
- Infrastructure verte et solutions basées sur la nature : Au-delà des solutions purement techniques, l’intégration de la nature dans la conception des infrastructures est une tendance croissante. Les corridors de biodiversité le long des routes, les techniques de bio-ingénierie pour stabiliser les sols et la gestion des eaux de ruissellement par des jardins de pluie sont des exemples de stratégies qui offrent des bénéfices environnementaux tout en renforçant la résilience des infrastructures.
La résilience climatique des infrastructures routières est devenue une priorité absolue pour le génie civil au Québec. Les menaces des inondations et de la dégradation par la chaleur nous obligent à repenser nos méthodes et à innover constamment. En investissant dans des systèmes de drainage améliorés, des matériaux plus résistants, des approches de planification prédictive et des solutions inspirées par la nature, les ingénieurs et les bâtisseurs de la province ne font pas que réparer les dommages existants; ils construisent les routes de demain. C’est un défi de taille, mais essentiel pour assurer la mobilité, la sécurité et la prospérité du Québec face aux réalités d’un climat en mutation.
1. Climat québécois et accélération des extrêmes
Il est avéré que les hivers demeurent rigoureux et que la fréquence et l’intensité des vagues de chaleur ont augmenté au Québec depuis deux décennies. Un rapport d’Ouranos, consortium en climatologie, souligne une hausse moyenne de 0,5 à 1 °C par décennie et des étés plus chauds et secs, favorisant les épisodes caniculaires (Ouranos – Changements climatiques au Québec).
3. Vagues de chaleur et dégradation de l’asphalte
Des études menées à l’École de technologie supérieure confirment que les températures supérieures à 35 °C ramollissent les enrobés bitumineux, augmentant l’orniérage et le poinçonnement, surtout sous trafic lourd (ETS – Chaleur et enrobés bitumineux). Les cycles gel-dégel, en outre, accentuent la fissuration et la formation de nids-de-poule.
4. Gestion des eaux pluviales et drainage
Le Guide de conception du ministère des Transports et de la Mobilité durable inclut désormais des recommandations pour des fossés élargis, des ponceaux de grand diamètre et l’utilisation localisée de chaussées perméables pour diminuer le ruissellement (MTMD – Guide d’aménagement routier, voir section « Gestion des eaux pluviales »).
5. Matériaux innovants résistant à la chaleur
Le Centre de recherche sur les infrastructures en béton de l’Université Laval (CRIB) teste des bitumes modifiés par des polymères et des additifs qui améliorent la tenue à haute température et la flexibilité au froid. Un de leurs rapports récents illustre une amélioration de 20 % de la rigidité à 60 °C (CRIB – Innovations en asphalte).
7. Modélisation climatique et planification
Le MTMD encourage l’usage de scénarios climatiques régionaux produits par Ouranos pour identifier « points chauds » et planifier les interventions prioritaires.
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*Dans cet article, l’emploi du masculin pour désigner des personnes n’a d’autres fins que celle d’alléger le texte.