Chaque jour, les manchettes et les rapports de l’industrie de la construction au Québec résonnent du même cri d’alarme : il manque de bras, que ce soit sur les chantiers ou dans les bureaux. On parle de milliers d’emplois à pourvoir, d’une pénurie de main-d’œuvre qui menace la croissance du secteur. Mais si le discours officiel met l’accent sur ce manque criant de travailleurs, la réalité vécue sur le terrain par de nombreux professionnels est bien plus complexe. Derrière le boom des projets et la promesse de salaires élevés se cache un marché de l’emploi souvent caractérisé par l’instabilité, une précarité qui force les travailleurs à naviguer entre des contrats éphémères et à sauter d’une entreprise à l’autre pour survivre et progresser.
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Le paradoxe du marché : une pénurie de loyauté ?
Les entrepreneurs se plaignent souvent du manque de loyauté des travailleurs, qui n’hésitent pas à quitter une entreprise à la première occasion pour une offre plus alléchante. Mais du point de vue de l’employé, la loyauté est une notion de survie. Dans un marché où les augmentations de salaire au sein de la même entreprise sont souvent modestes, le moyen le plus rapide et le plus efficace d’obtenir une hausse substantielle est de changer d’employeur. Un simple ajustement de 1 ou 2 dollars de l’heure ailleurs peut représenter un gain annuel significatif, qui peut faire la différence pour l’achat d’une maison ou la stabilité financière d’une famille. Cette réalité crée un cercle vicieux : les employeurs hésitent à investir lourdement dans la formation de leurs employés de peur de les voir partir, et les travailleurs, se sentant peu valorisés ou sans perspective d’avancement, partent à la recherche d’une meilleure opportunité.

Le quotidien des travailleurs : entre contrats de courte durée et « job hopping »
Pour de nombreux travailleurs de la construction, la stabilité d’un emploi permanent est un luxe. Leur réalité est celle d’un enchaînement de contrats de courte durée, dictés par la nature des projets. Un ouvrier spécialisé peut travailler sur un chantier de rénovation commerciale pendant trois mois, puis se retrouver sans contrat pour un mois, avant de démarrer un nouveau projet de construction résidentielle. Ces périodes sans emploi, même courtes, créent une insécurité financière majeure qui complique l’accès au crédit, aux prêts immobiliers ou à la planification familiale. Cette instabilité structurelle encourage le « job hopping » non pas par manque d’engagement, mais par nécessité de toujours s’assurer le prochain chèque de paie.
Le fossé entre l’apprenti et le compagnon : le défi de la rétention de la relève
L’un des plus grands défis de l’industrie est la rétention des jeunes travailleurs. La Commission de la construction du Québec (CCQ) a établi un système de salaires où l’apprenti est payé un pourcentage du taux horaire du compagnon, un taux qui augmente avec l’expérience. Si ce modèle est conçu pour valoriser l’expérience, il peut aussi devenir un obstacle. Un apprenti de première année gagne significativement moins qu’un compagnon, même s’il accomplit une grande partie des mêmes tâches. Ce fossé salarial, combiné au manque de stabilité et aux efforts souvent insuffisants pour reconnaître leur contribution, peut amener les jeunes à se sentir dévalorisés. Ils finissent par quitter l’industrie, ou par changer d’entreprise dès qu’ils passent au niveau supérieur pour une augmentation de salaire rapide.
Un cercle vicieux pour l’industrie entière
Cette instabilité du marché de l’emploi nuit à tout le monde. Pour les entreprises, le roulement constant du personnel coûte cher en temps et en argent, car il faut toujours recommencer le processus de recrutement et de formation. Cela a aussi un impact direct sur la productivité et la qualité des projets, car les équipes n’ont pas le temps de développer la synergie et la cohésion nécessaires pour fonctionner de manière optimale. Pour les travailleurs, cette précarité crée un stress financier et un manque de sentiment d’appartenance à une entreprise ou à une équipe, ce qui affaiblit le lien de fidélité et de loyauté.
La pénurie de main-d’œuvre dans l’industrie de la construction n’est pas un problème de chiffres, mais un enjeu de loyauté et de stabilité. Le discours officiel masque une réalité où de nombreux travailleurs doivent choisir entre la fidélité à une entreprise et leur propre sécurité financière. Pour attirer et retenir la main-d’œuvre dont elle a désespérément besoin, l’industrie doit repenser son modèle. Il ne suffit plus de proposer des emplois, mais de créer des carrières stables, où la loyauté est une valeur réciproque, profitable à la fois pour l’entreprise et pour le travailleur.
jackstaff.ca
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*Dans cet article, l’emploi du masculin pour désigner des personnes n’a d’autres fins que celle d’alléger le texte.